Page:Achard - Belle-Rose, 1847.djvu/280

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– Je dois vous prévenir que j’ai reçu l’ordre d’employer contre vous des moyens dont la loi autorise l’usage si vous continuez à vous taire.

– Vous ferez votre devoir, monsieur ; je tâcherai de faire le mien.

– Vous êtes bien jeune ; vous avez peut-être une mère, une femme, une sœur ; un mot vous rendrait à la liberté !

– J’achèterais cette liberté au prix de mon honneur. Vous-même, si vous étiez père, ne le conseilleriez pas à votre fils.

Le gouverneur se tut pendant quelques minutes ; le greffier écrivait les réponses.

– Ainsi, monsieur, vous n’avez plus rien à déclarer ? reprit le gouverneur.

– Rien.

– Que votre volonté soit faite !

Le gouverneur fit un signe à deux hommes que Belle-Rose n’avait pas remarqués, et qui s’étaient tenus jusqu’à ce moment dans l’un des coins obscurs de la salle. Ces deux hommes saisirent le prisonnier et commencèrent à le déshabiller. Quand il n’eut plus que sa culotte et sa chemise, on l’étendit sur une sorte de chaise longue ; on lia ses bras aux bâtons de la chaise, et le médecin s’approcha du patient. Belle-Rose s’était laissé faire sans opposer la moindre résistance. Quand il fut à moitié couché sur la chaise, le gouverneur lui demanda s’il persistait encore dans son refus.

– Je ne puis pas déserter au moment du combat, lui répondit Belle-Rose avec un pâle sourire.

– Il faut donc que l’ordre soit exécuté, fit le gouverneur.

L’un des deux tortionnaires apporta près de la chaise deux grands seaux pleins d’eau, remplit une pinte et l’approcha des lèvres du patient.

– Ah ! fit Belle-Rose, c’est le supplice de l’eau !

– Oui, monsieur, dit le médecin, il tue bien quelquefois ; mais si l’on en réchappe, on n’est pas mutilé.