Page:Achard - Belle-Rose, 1847.djvu/341

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Pomereux eut peine à la reconnaître, tant était profond le changement qui s’était opéré en elle. Il joignit les mains avec un geste de pitié.

– Mais, madame, s’écria-t-il, vous vous tuez !

– Le désespoir n’est pas un suicide, répondit-elle.

– Mordieu ! madame, reprit le comte avec une violence qui ne respectait pas trop la sainteté des lieux, il ne sera pas dit que je vous aurai laissée mourir. Belle-Rose n’est pas mort !

La joie fut si vive au cœur de Suzanne, qu’elle chancela et s’appuya contre la grille du parloir pour ne pas tomber ; des larmes jaillirent de ses yeux, et elle se mit à sangloter comme un enfant sans savoir ce qu’elle faisait. M. de Pomereux, qui était plus ému qu’il n’aurait voulu le paraître, laissa passer ce premier moment sans l’interrompre. Quand Suzanne se fut un peu calmée, elle releva son visage où brillait un sourire baigné de larmes.

– Merci ! lui dit-elle, vous ne savez pas tout le bien que vous me faites.

– Eh ! parbleu ! je m’en doute bien un peu à tout le mal que ça me fait. Je m’intéresse à vous d’une étrange façon… Je crois, vrai Dieu, que vous m’avez retourné, et c’est, ma foi, tant pis pour vous, car si je me mets une bonne fois à vous aimer tout de bon, vous m’aurez sur les bras pour tout le reste de votre vie.

– Êtes-vous bien sûr qu’il ne soit point mort ?

– Voilà que vous ne m’écoutez même pas… Oui, oui, j’en suis très sûr.

– De qui le tenez-vous ?

– De mon grand cousin, qui en a reçu la nouvelle d’Angleterre, où le capitaine Belle-Rose est passé.

– Mais peut-être est-il dangereusement blessé ?

– À vous parler franc, il a une balle au beau milieu de la poitrine… Eh bien ! voilà que vous pâlissez à présent !… Voyons, la blessure n’est point mortelle ! Eh ! que diable ! j’ai vu guérir des gens qui étaient percés