Page:Achard - Belle-Rose, 1847.djvu/361

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Le silence était lugubre ; la respiration oppressée de Gabrielle avait fait place à un souffle léger qui ne s’entendait pas. Ses paupières étaient closes, ses lèvres ne remuaient plus ; elle semblait dormir. Suzanne la baisa au front pieusement comme une mère qui bénit son enfant ; elle allait se retirer lorsque Gabrielle, dénouant ses mains, les roula autour du cou de Suzanne.

– Restez près de moi, lui dit-elle d’une voix douce qui effleura la joue de Suzanne comme l’haleine d’un sylphe.

Suzanne s’assit sur le bord du lit.

– Plus près, plus près encore, reprit Gabrielle.

Suzanne se fit une petite place tout contre son amie, qui lui baisait les mains en la regardant avec des yeux humides.

– Écoutez-moi, Suzanne, continua Gabrielle, j’ai un service à vous demander. Me promettez-vous de me le rendre ?

– Je vous le promets.

– Et de n’en parler à personne ?

– À personne ; cependant, il en est une pour qui je n’ai point de secret.

– Oh ! vous n’êtes qu’un à deux ! dit Gabrielle avec un sourire ingénu. Lui, c’est encore vous.

– Dites-moi, Gabrielle, que voulez-vous que je fasse ?

Gabrielle se recueillit un instant et tourna vers Suzanne un regard suppliant.

– Au moins, dit-elle, vous ne me blâmerez pas ?

Suzanne s’inclina vers elle avec un doux sourire et l’embrassa.

– Gabrielle, lui dit-elle bien bas, vous êtes pure comme le jour. Comment voulez-vous que je vous blâme, moi qui aime aussi !

Mlle de Mesle tressaillit dans les bras de Suzanne ; une rougeur subite colora son visage qu’elle couvrit de ses deux mains.