Page:Achard - Belle-Rose, 1847.djvu/410

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– M. Mériset ne s’était point trompé, dit Belle-Rose.

Cinq minutes après, trois lumières formant les pointes d’un triangle brillaient à la lucarne du grenier. La Déroute, qui faisait sa ronde dans les jardins du couvent, s’arrêta court.

– Allons ! c’est pour demain, dit-il, et il s’en alla philosophiquement rejoindre Jérôme Patu.

Le lendemain, Cornélius, enrubanné, se rendit au couvent des dames bénédictines ; il était suivi ce jour-là d’un grand laquais porteur de deux beaux chandeliers d’argent pour l’autel de sainte Claire, en qui la mère Évangélique avait une dévotion toute particulière. Le présent fut le bienvenu, et Cornélius eut le temps d’entretenir Claudine au parloir. Claudine, mise en peu de mots au fait des circonstances nouvelles, se chargea d’en instruire Suzanne et promit de suivre aveuglément les indications de la Déroute. Elle profita de la nouveauté des chandeliers pour obtenir de la supérieure la permission de parcourir les jardins au clair de lune et s’arrangea de manière que Suzanne eût avec elle, dans la matinée, une longue conférence. Une inquiétude profonde agitait leur âme, que rien ne pouvait calmer, ni la promenade, ni la prière. Vers midi, Claudine rencontra la Déroute, qui marchait une serpe à la main, mutilant les abricotiers. Personne n’était autour d’eux.

– Soyez à la brune derrière les noyers, à l’endroit où le mur fait le coude. C’est là.

– Nous y serons, dit Claudine.

Une religieuse passa. La Déroute se mit à tailler en plein bois, et Claudine chercha par terre des fleurs qui n’y étaient pas. À la tombée de la nuit, Claudine et Suzanne se jetèrent à genoux par un mouvement instinctif et levèrent leurs mains vers Dieu. C’était l’heure décisive. Elles se levèrent plus fortes et se tinrent prêtes. La cloche de la chapelle sonna, on entendit le pas des religieuses qui se rendaient à l’office du soir, et bientôt les chants