Page:Achard - Belle-Rose, 1847.djvu/414

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Bouletord qui écorchait les arbres de la pointe un peu rouge de son poignard.

– Laissez donc ! reprenait Grippard, il sera allé mourir dans quelque trou, vous l’avez rudement frappé.

– Parbleu ! il serait mort sur place si tu n’avais pas crié comme un sourd.

– Ma foi, quand j’ai dit : Va-t’en au diable ! je comptais bien le renvoyer d’où il vient ; après tout, il y est peut-être à cette heure.

– Et dire que je l’ai tenu au bout de cette lame ! As-tu vu, Grippard, comme il a disparu tout d’un coup ? C’est un sorcier, bien sûr.

Et Bouletord longeait le mur, les doigts noués autour du manche de son poignard, regardant partout, l’œil et l’oreille au guet. Au bout de cinquante pas, son pied heurta contre un cadavre couché au coin d’une borne, la tête appuyée contre le mur.

– Le voilà ! s’écria le maréchal des logis, et il se pencha vivement.

Grippard eut un frisson, mais Bouletord se dressa comme un tigre.

– Mordieu ! c’est un des miens qu’ils ont tué, dit-il ; le coup est à la gorge.

Bouletord prit un sifflet et siffla. À ce signal, plusieurs archers apostés çà et là accoururent. Ils n’avaient rien vu et rien entendu. Autour du cadavre, le sol était foulé par des pas nombreux, mais les meurtriers n’avaient pas laissé d’autre trace de leur passage. L’un des archers déclara cependant que deux hommes enveloppés de manteaux s’étaient approchés du mur un quart d’heure avant le cri de Grippard ; il leur avait demandé le mot d’ordre la main sur la crosse de son pistolet ; les deux hommes le lui avaient donné, et il les avait laissé passer, les prenant pour des agents de Bouletord.

– Le mot d’ordre ? ils vous l’ont donné ? s’écria Bouletord.