Page:Achard - Belle-Rose, 1847.djvu/513

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– La Déroute, lui dit-il d’un ton de voix profond, il faut que nous partions ; il le faut !

– Enfin ! s’écria le sergent avec explosion.

– Je ne sais pas encore comment nous partirons, reprit Belle-Rose, mais je sais bien que, dussé-je sortir d’ici en passant sur le ventre de M. de Charny, j’en sortirai.

– Sortir n’est rien, arriver est tout, observa le sergent.

Cornélius survint sur ces entrefaites ; il vit bien à l’air des deux interlocuteurs qu’ils agitaient une grave question.

– Eh ! monsieur de l’Irlande, s’écria la Déroute, qui se plaisait à qualifier ainsi Cornélius dans ses moments de joie, c’est un complot qui s’ourdit entre nous. Je parie un écu de six livres contre un sou que vous en serez.

– Il s’agit de partir, ajouta Belle-Rose.

– J’y pensais, dit Cornélius.

Les deux frères se serrèrent la main.

Grippard fut appelé au conseil ; s’il n’était pas très fort dans l’invention, il était prompt et déterminé dans l’exécution. La Déroute, qui était fou de joie, proposa de s’armer jusqu’aux dents, d’attendre la nuit, d’exécuter une sortie en colonne sur deux de front et deux de profondeur, de fondre sur les lignes ennemies et de culbuter quiconque s’opposerait à leur passage.

– Nous montons à cheval et nous galopons jusqu’à la frontière ! s’écria Grippard enthousiasmé.

– À moins qu’on ne tue la moitié de la colonne et qu’on ne fasse l’autre prisonnière, dit tranquillement Cornélius.

Cette observation fit tomber l’exaltation du caporal, le sergent se gratta l’oreille.

– Allons ! dit-il, mon plan ne vaut rien.

– Eh ! reprit Belle-Rose, il a cela de bon qu’il est prompt.