Page:Achard - Belle-Rose, 1847.djvu/549

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Cependant, au bout d’une heure ou deux d’attente, la Déroute commença à trouver le temps fort long, le retard que mettait Belle-Rose à reparaître lui semblait inexplicable ; il fit vingt fois le tour de la cour, éveilla deux ou trois fois Grippard pour se distraire, mais Grippard n’avait pas plus tôt ouvert les yeux qu’il les refermait ; enfin, n’y tenant plus, il prit le parti de monter lui-même dans les appartements de M. de Louvois. Un huissier qu’il interrogea lui apprit que Belle-Rose était dans le cabinet du ministre en train d’écrire la relation officielle du passage du Rhin. Comme il redescendait presque tranquillisé, la Déroute se rappela tout à coup l’ordre qu’avait donné M. de Charny en montant en voiture.

– La route de Saint-Denis, pensa-t-il, est aussi la route de Sainte-Claire d’Ennery.

Le front de la Déroute se rembrunit.

– Mon maître n’a-t-il rien écrit ? demanda-t-il vivement à l’huissier.

– Il a écrit une lettre, répondit un laquais qui était dans l’antichambre, et qui était le même que M. de Charny avait arrêté.

– Cette lettre, où est-elle ?

– M. de Charny l’a prise, me disant qu’il s’en chargeait.

La Déroute fronça le sourcil ; le visage de M. de Charny avait, au moment où le gentilhomme était monté en voiture, une expression de gaieté lugubre dont le fidèle sergent se souvint. Sans savoir pourquoi, il eut peur, et bientôt sa propre émotion l’effraya ; c’était un homme, on le sait, qui croyait aux pressentiments et qui subissait