Page:Achard - Belle-Rose, 1847.djvu/84

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– Eh ! eh ! dit-il tout bas à Belle-Rose et de l’air le plus mystérieux du monde, il y a du nouveau.

– Une lettre ?

– Mieux que cela.

– Une visite ?

– Justement. Une visite comme les plus huppés gentilshommes de notre glorieux roi en voudraient bien recevoir.

– C’est donc une femme ?

– Et des plus jolies ! œil brun, doux et brillant, cheveux dorés comme des fils de soie, un petit nez fin, des lèvres à faire honte aux plus fraîches roses, et quelles dents ! Ah ! mon gentilhomme, qu’on se changerait volontiers en cerise pour être mordu par ces dents-là !

– Monsieur Mériset, la poésie vous a fait oublier ma qualité ; point de gentilhommerie, s’il vous plaît.

– Il y tient, pensa l’honnête propriétaire. Et il reprit tout haut : – Voilà cinquante-deux ans que je loge dans la rue du Pot-de-Fer-Saint-Sulpice, et il ne m’est point encore arrivé de voir pareil visage.

– Qu’est-ce enfin ? une soubrette ?…

– Une soubrette ! ah ! fi ! avec cette tournure de grande dame… C’est une marquise…

– Vous l’a-t-elle dit ?

– Je l’ai deviné.

Belle-Rose sourit, ayant une expérience personnelle de la perspicacité de son hôte.

– Va pour une marquise, reprit-il. Au moins vous a-t-elle dit quelque chose ?

– Certainement. Elle m’a dit qu’elle reviendrait.

– Ah !

– Puis elle est repartie dans la chaise qui l’avait amenée.

– Sans rien ajouter ?

– Ma foi, non ; mais j’ai bien compris à son air qu’elle était contrariée de ne vous avoir pas rencontré.

Belle-Rose ne douta pas un instant que la marquise