Page:Adam - Mes premières armes littéraires et politiques.djvu/33

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près de la cour du Louvre. Quel réconfort je pourrais alors trouver là, au seuil de mon temple !

Mes enthousiasmes avaient leur chute, leur effondrement. Lorsque je traversais les boulevards, ou que j’étais cernée par la foule, je me disais que jamais, jamais, dans cette cohue, dans ce brouhaha des choses, dans cette immensité regorgeante de la capitale, au milieu de ce qui me semblait partout encombré, tassé, jamais je ne pourrais me faire une toute petite place !

J’allais à la Bibliothèque Impériale. Que venais-je faire là, moi infime ? Est-ce qu’un livre conçu par l’esprit que ma tante Sophie et mon père avaient si étrangement éduqué, formé, trouverait un jour son casier spécial au milieu de tant de chefs-d’œuvres, de tant de livres de valeur ?

Plus j’errais dans ce Paris, plus je devenais consciente de l’impossibilité pour moi d’y être quelqu’un. La seule chose qui me distinguât des autres et qu’il me fallait reconnaître, tant on me le répétait, même dans la rue, c’est que ma personne de dix-neuf ans était agréable. Les fameux petits Savoyards de Mme Récamier ne m’étaient pas inconnus. On me regardait, on murmurait une parole aimable ; mais tout à coup la peur me prenait de ce genre de succès dans ce Paris dont je connaissais les dangers, les entraînements.