Page:Ades - Josipovici - Mirbeau - Le Livre de Goha le Simple.djvu/22

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qu’Alyçum avait de sa beauté lui donnait un constant souci de séduire et mettait de la joliesse sur ses traits un peu durs.

— Mon père, voulez-vous m’éclairer ? dit-il… J’ai besoin de vos conseils.

— T’éclairer ? je te croyais mort d’ennui… Ma conférence a duré deux heures !

Sa physionomie s’assombrit tout à coup et il ajouta :

— Je suis un mauvais maître.

Ces mots prononcés avec amertume surprirent le jeune homme. Mais déjà le cheik l’avait pris familièrement par le bras :

— Viens, dit-il, accompagne-moi.

Alyçum ramena sur son visage une gaze blanche fixée à son turban.

— Toujours la même folie ! plaisanta Cheik-el-Zaki.

Alyçum ainsi que Mokawa-Kendi et Akr-Zeid-Taï, ses amis, ne se mêlait jamais à la foule la face découverte. On les voyait le plus souvent ensemble. Leurs silhouettes minces et droites se ressemblaient et, dans toute l’Égypte, la perfection de leur beauté avait illustré leur nom. Il répondit avec emphase que sur une main vulgaire l’émeraude semble fausse et que dans une ambiance médiocre la beauté perd de son éclat.

— Prends bien garde, dit El-Zaki, le vent soulève ton voile… le regard d’un passant pourrait t’enlaidir.

— Vous vous moquez de moi, mon père ; voulez-vous que je me découvre ?