Page:Agoult - Histoire des commencements de la république des Pays-Bas - 1581-1625.djvu/48

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patibles avec aucun joug étranger. Mais de tous les jougs nul ne devait leur sembler pire que le joug espagnol. A la vue seule d’un Castillan et d’un Frison, l’on comprenait l’antipathie des races. L’homme du Nord a gardé la haute stature de ses ancêtres, les longs cheveux blonds, le teint blanc, cet œil à fleur de tête et d’un bleu vague où le feu des passions fait rarement jaillir l’étincelle, cet air lent et froid qui n’exclut chez lui ni la gaieté ni le goût des jeux publics et des plaisirs de la table. Les bouillonnements du sang méridional étonnent son flegme. Sa sincérité, sa simplicité s’indignent de la rodomontade et du faste espagnols. Il ne s’accoutume pas à ces Castillans à la mine chétive et altière, au parler superbe, à l’âpre humeur. L’éclair sinistre de leurs yeux noirs, les penchants cruels qui se trahissent jusque dans leur sourire, lui inspirent une répulsion profonde. Jamais, le voulût-il, il ne pourra subir leur loi.

Ce fut la faute de Charles-Quint de méconnaître cette antipathie de race et de vouloir faire des Pays-Bas une province de la monarchie espagnole. Après la bataille de Pavie qui le rendait quasi maitre de l’Europe, il s’essaya dans les Pays-Bas à changer le gouvernement des villes. Il y mit des garnisons étrangères ; il subordonna le grand conseil de Malines et la cour suprême de Hollande, dans l’exercice de leurs fonctions législa-