Page:Aimard - Les Rôdeurs de frontières, 1910.djvu/13

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
7
LES RODEURS DE FRONTIÈRES

tout à cette grande fraternité des peuples qu’il n’est permis à personne de mépriser, et dont ceux qui en oublient les préceptes divins et sacrés auront un jour à rendre un compte terrible.

On ne se fait pas impunément le meurtrier de toute une race, on ne se baigne pas sciemment dans le sang innocent, sans qu’enfin ce sang ne crie vengeance, et que le jour de la justice ne luise et ne vienne brusquement jeter son épée dans la balance entre les vainqueurs et les vaincus.

À l’époque où commence notre histoire, c’est-à-dire vers la fin de 1812, l’émigration n’avait pas pris encore cet immense accroissement qu’elle devait acquérir bientôt, elle ne faisait pour ainsi dire que commencer et les vastes forêts qui s’étendaient et couvraient un immense espace, entre les frontières des États Unis et du Mexique, n’étaient parcourues que par les pas furtifs des trafiquants et des coureurs des bois, ou par les mocksens silencieux des Peaux-Rouges.

C’est au milieu de l’une des immenses forêts dont nous venons de parler que commence notre récit, le 27 octobre 1812, vers trois heures de l’après-midi.

La chaleur avait été étouffante sous le couvert ; mais en ce moment les rayons de plus en plus obliques du soleil allongeaient les grandes ombres des arbres et la brise du soir qui venait de se lever rafraîchissait l’atmosphère et emportait au loin les nuées de moustiques qui pendant toute la matinée avaient bourdonné en tournoyant au-dessus des marécages des clairières.

C’était sur les bords d’un affluent perdu de l’Arkansas ; les arbres des deux rives inclinés doucement