Page:Alfieri - De la Tyrannie.djvu/31

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

la nature a donné une grande force de fibres, auxquels une éducation plus soignée a donné une certaine élévation d’âme, aussi grande que les temps peuvent le permettre, et qui par cela même sont plus au-dessus de la crainte, et faits pour la vérité ; et, après avoir cherché soigneusement ce que ces hommes sont, peuvent ou doivent être, nous jugeons après par leur prix et par induction, quels sont et doivent être tous les autres. Ces hommes, dignes certainement d’un meilleur sort, voient, hélas ! tous les jours, sous la tyrannie, le cultivateur opprimé par des charges arbitraires, traîner une vie pénible et malheureuse. Une grande partie d’entre eux sont arrachés par force de leurs chaumières pour porter les armes, non pour leur patrie, mais en faveur de leur plus grand ennemi, contre eux-mêmes et contre leur liberté. Ils voient dans les villes la moitié du peuple plongée dans la misère, tandis que l’autre moitié nage dans l’abondance, toutes deux cependant également corrompues. Ils voient, en outre, la justice vendue, la vertu méprisée, les délateurs honorés, la pauvreté devenue un crime, les charges et les honneurs arrachés par le vice de déhonté,