Page:Anatole France - L’Église et la République.djvu/54

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nion, ce qui, selon la doctrine catholique, est à la vérité condamnable en matière de foi. Et qu’est-ce qui n’est pas matière de foi, depuis que le pape infaillible s’est prononcé sur les mœurs comme sur les dogmes ? Il avertissait le gouvernement qu’en tolérant ce désordre, il s’en rendrait complice, annonçait des représailles sanglantes contre ceux qui attaqueraient l’armée, ce qu’il entendait lui-même d’une attaque par la parole et par la plume et qui n’était, dans le fait, que la dénonciation généreuse d’une erreur judiciaire. Enfin il proclamait la subordination du pouvoir civil à l’autorité militaire, mettant ainsi le bras séculier sous l’obéissance directe de la puissance spirituelle.

Faut-il, disait ce moine éloquent, faut-il laisser aux mauvais libre carrière ? Non certes ! Lorsque la persuasion a échoué, lorsque l’amour a été impuissant, il faut s’armer de la force coercitive, brandir le glaive, terroriser, sévir, frapper : il faut imposer la justice. L’emploi de la force en cette conjoncture n’est pas seulement licite et légitime, il est obligatoire : et la force ainsi employée n’est plus une puissance brutale ; elle devient énergie bienfaisante et sainte.

L’art suprême du gouvernement est de savoir l’heure exacte où la tolérance devient de la complicité. Malheur à ceux qui masquent leur faiblesse criminelle derrière une insuffisante légalité, à ceux qui laissent le glaive s’émousser, à ceux dont la bonté tourne en débonnaireté ! Le pays livré à toutes les angoisses les rejettera flétris, pour n’avoir pas su vouloir — même au prix du sang — le défendre et le sauver.

… Aussi, Messieurs, la France conserve et soigne son