Page:Anatole France - Les Opinions de Jérôme Coignard.djvu/162

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l’essence de ce pied et du reste, on ne rit plus. J’aurais dû, étant chrétien, concevoir plus tôt tout ce qu’il y a de malignité dans cette maxime d’un païen : « Heureux qui put connaître les causes ! » j’aurais dû m’enfermer dans la sainte ignorance comme dans un verger clos, et rester semblable aux petits enfants. Je me serais amusé, non point à vrai dire, des jeux grossiers de ce Mondor (le Molière du Pont-Neuf aurait peu d’attrait pour moi, quand l’autre me semble déjà trop scurrile[1]) mais, je me serais amusé des herbes de mon jardin, et j’aurais loué Dieu dans les fleurs et les fruits de mes pommiers. Une curiosité immodérée m’a entraîné, mon fils ; j’ai perdu, dans la conversation des livres et des savants, la paix du cœur, la sainte simplicité, et cette pureté des humbles d’autant plus admirable qu’elle ne s’altère ni au cabaret ni dans les bouges, comme il se voit par

  1. C’est un ecclésiastique qui parle. (Note de l’éditeur.)