Page:Anatole France - Les Opinions de Jérôme Coignard.djvu/36

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sibilité la plus vraie unie à la logique la plus fausse. Ce n’était alors qu’un petit vagabond, qui, malheureusement pour lui, trouvait d’autres abbés que M. Jérôme Coignard, sur les bancs des promenades désertes de Lyon. On peut regretter que M. Coignard, qui connut toute espèce de personnes, n’ait pas rencontré d’aventure le jeune ami de madame de Warens. Mais cela n’eût fait qu’une scène amusante, un tableau romantique. Jean-Jacques aurait peu goûté la sagesse désabusée de notre philosophe. Rien ne ressemble moins à la philosophie de Rousseau que celle de M. l’abbé Coignard. Cette dernière est empreinte d’une bienveillante ironie. Elle est indulgente et facile. Fondée sur l’infirmité humaine, elle est solide par la base. À l’autre, manque le doute heureux et le sourire léger. Comme elle s’assied sur le fondement imaginaire de la bonté originelle de nos semblables, elle se trouve dans une posture gênante, dont elle ne sent pas elle-même tout le