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l’âge, était devenue si vigoureuse qu’elle s’attaquait à toutes les impuretés de la paroisse et transperçait sept fois le jour, de la pointe de sa langue, les pécheurs charnels de la rue Saint-Jacques.

Mais Catherine elle-même ne savait pas combien sa vengeance était complète. Elle avait vu venir sur la place mademoiselle Lecœur. Elle n’avait pas vu mon père qui suivait de près.

Il venait avec moi chercher sous le porche l’abbé pour l’emmener au Petit-Bacchus. Mon père avait du goût pour Catherine. Rien ne le fâchait comme de la voir serrée de près par les galants. Il n’avait pas d’illusions sur sa conduite. Mais, comme il disait, savoir et voir sont deux choses différentes. Or, les cris de Catherine lui étaient parvenus très clairs aux oreilles. Il était vif et incapable de se contraindre. J’eus grand peur que sa colère n’éclatât en propos grossiers et en menaces brutales. Je le voyais déjà tirant sa lardoire, qu’il portait aux cor-