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LES DIEUX ONT SOIF

et par une confiance illimitée dans le pouvoir de ses charmes.

Le militaire qui l’accompagnait était dans la fleur de la jeunesse. Un casque de cuivre, garni d’une peau de panthère, et la crête ornée de chenille ponceau, ombrageait sa tête de chérubin et répandait sur son dos une longue et terrible crinière. Sa veste rouge, en façon de brassière, se gardait de descendre jusqu’aux reins pour n’en pas cacher l’élégante cambrure. Il portait à la ceinture un énorme sabre, dont la poignée en bec d’aigle resplendissait. Une culotte à pont, d’un bleu tendre, moulait les muscles élégants de ses jambes, et des soutaches d’un bleu sombre dessinaient leurs riches arabesques sur ses cuisses. Il avait l’air d’un danseur costumé pour quelque rôle martial et galant, dans Achille à Scyros ou les Noces d’Alexandre, par un élève de David attentif à serrer la forme.

Gamelin se rappelait confusément l’avoir déjà vu. C’était en effet le militaire qu’il avait rencontré, quinze jours auparavant, haranguant le peuple sur les galeries du Théâtre de la Nation.

La citoyenne Rochemaure le nomma :

— Le citoyen Henry, membre du Comité révolutionnaire de la section des Droits de l’Homme.