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LES DIEUX ONT SOIF

dormit jusqu’au jour d’un sommeil tranquille et profond.

Le lendemain, après une dernière journée de travail, l’académie promeneuse reprit le chemin de Paris. Quand Jean Blaise paya son hôte en assignats, le citoyen Poitrine se lamenta de ne plus voir que de « l’argent carré » et promit une belle chandelle au bougre qui ramènerait les jaunets.

Il offrit des fleurs aux citoyennes. Par son ordre, la Tronche, sur une échelle, en sabots et troussée, montrant au jour ses mollets crasseux et resplendissants, coupait infatigablement des roses aux rosiers grimpants qui couvraient la muraille. De ses larges mains les roses tombaient en pluie, en torrents, en avalanche, dans les jupes tendues d’Élodie, de Julienne et de la Thévenin. La berline en fut pleine. Tous, rentrant à la nuit, en apportèrent chez eux des brassées, et leur sommeil et leur réveil en fut tout parfumé.