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LES DIEUX ONT SOIF

n’avez conduits au Capitole que pour les précipiter ensuite de la roche Tarpéienne, Necker, Mirabeau, La Fayette, Bailly, Pétion, Manuel, et tant d’autres. Qui nous dit que vous ne préparez pas le même sort à vos nouveaux héros ?… On ne sait plus.

— Nommez-les, citoyen Blaise, nommez-les, ces héros que nous nous préparons à sacrifier ! dit Gamelin, d’un ton qui rappela le marchand d’estampes à la prudence.

— Je suis républicain et patriote, répliqua-t-il, la main sur son cœur. Je suis aussi républicain que vous, je suis aussi patriote que vous, citoyen Évariste Gamelin. Je ne soupçonne pas votre civisme et ne vous accuse nullement de versatilité. Mais sachez que mon civisme et mon dévouement à la chose publique sont attestés par des actes nombreux. Mes principes, les voici : Je donne ma confiance à tout individu capable de servir la nation. Devant les hommes que la voix publique désigne au périlleux honneur du pouvoir législatif, comme Marat, comme Robespierre, je m’incline ; je suis prêt à les aider dans la mesure de mes faibles moyens et à leur apporter l’humble concours d’un bon citoyen. Les comités peuvent témoigner de mon zèle et de mon dévouement. En société avec de vrais patriotes, j’ai fourni de l’avoine et du