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vité du révérend George Austen lui auraient sans doute valu, à eux seuls, le respect et l’estime de tous, mais il dut à des qualités bien différentes de gagner la sympathie et l’amitié des hobereaux des environs. Malgré son latin et ses sermons, il savait s’intéresser aux choses de la vie rurale ; il dirigeait son maître-valet pour la culture et l’exploitation des terres attachées à ses bénéfices, veillait lui-même très exactement au bon rendement de ses champs, à la rentrée de ses récoltes, et — ce qui ne manquait pas de passer aux yeux des « squires » et des paysans pour une grande preuve de sagesse, — il faisait paître dans ses prés les plus beaux moutons du pays.

La vie de Mme Austen n’était pas moins bien remplie que celle de son époux. Toutes les heures en étaient occupées par des soins multiples et divers. Elle veillait en mère un peu sévère, mais bonne et avisée, à la santé et à l’éducation de ses enfants. Sous sa direction, ses deux filles, Cassandre et Jane, furent initiées de bonne heure au gouvernement d’un ménage et à ces nombreux travaux d’aiguille « presque sans utilité et dénués de toute beauté » — comme Jane le dira plus tard dans un de ses romans — auxquels les femmes s’occupaient pour échapper à l’ennui des interminables veillées d’hiver. Tout en leur donnant de si utiles leçons, Mme Austen ne négligeait pas de cultiver chez ses filles quelques talents plus aimables : elle enseigna le dessin à Cassandre et lui apprit à faire ces gentilles esquisses qui nous permettent de connaître la gracieuse image de Jane Austen. Son autre fille reçut d’elle les seules leçons de musique qu’elle eut jamais ; grâce à ces leçons, Jane devint capable de jouer agréablement du clavecin et de s’accompagner en chantant quelques mélodies composées par William Jackson d’Exeter, ou « Demande si la rose est fraîche », air tiré de « Suzanne », oratorio de M. Handel.[1]

  1. Jane Austen, her homes and her friends, by Constance Hill. Page 86.