Page:Annales de l universite de lyon nouvelle serie II 30 31 32 1915.djvu/366

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elles — qu’entraîne, par exemple, la situation d’un châtelain, donne à certains membres de la société provinciale une liberté, une indépendance plus complète que celle dont jouissent Sir John Middleton ou Sir Thomas Bertram. Un jeune homme comme Bingley d’« Orgueil et Parti pris », qui vient d’acheter un domaine dans un comté, est libre d’abandonner sa nouvelle résidence, de la revendre s’il en a la fantaisie. Au contraire, un châtelain dont la famille est depuis des générations installée dans un pays peut difficilement se résoudre à confier ses fermiers et ses paysans à un autre maître. Il est suzerain et si ses vassaux lui doivent obéissance, il est tenu de veiller sur eux, fut-ce de bien loin et de bien haut. Au-dessus du bon plaisir du « squire », l’opinion de ce que le pays, — c’est-à-dire sa famille, ses fermiers et les hobereaux du voisinage — attend de lui, est comme une loi supérieure qu’il ne saurait enfreindre sans se déshonorer à ses propres veux. Il est d’ailleurs fortement attaché à son domaine par tous les liens de la tradition, de l’éducation et de l’habitude. Il ne peut pas être tenu pour oisif, car lorsqu’il n’occupe pas un siège au Parlement, il exerce les fonctions de « justice of the peace » et règle les différends qui s’élèvent entre les gens du pays. Mais, à côté du seigneur héréditaire de tel ou tel village, s’il y a parmi les membres de la « gentry » quelque nouvel acquéreur d’un domaine ou quelque jeune homme vivant des revenus de terres qu’un intendant régit pour lui, celui-là peut vraiment être qualifié d’inutile. « Mr. Bingley tenait une fortune d’environ cent mille livres sterling de son père qui avait eu l’intention d’acquérir un domaine et n’avait pas vécu assez longtemps pour mettre son projet à exécution. Mr. Bingley avait lui aussi la même intention, et parfois croyait avoir arrêté son choix sur tel ou tel comté… Ses sœurs attendaient avec impatience le moment où leur frère serait seigneur et maître d’un domaine ». En attendant qu’il fasse l’acquisition d’une terre et jusqu’à ce qu’il soit devenu par de longues années de résidence un véritable « squire »