Page:Annales de l universite de lyon nouvelle serie II 30 31 32 1915.djvu/493

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quer que « L’abbaye de Northanger » n’est pas destiné à contenir ces longs récits, ces « aventures de la déplorable Mathilde », qui diversifient agréablement les œuvres alors en vogue. « Mme Thorpe était veuve et n’était pas riche. C’était une femme d’humeur égale et portée à la bienveillance… Sa fille aînée était une fort belle personne, et les deux plus jeunes… étaient tout à fait passables. Ces brèves indications sont destinées par l’auteur à suppléer à une longue et minutieuse narration que ferait Mme Thorpe elle-même, et qui mettrait le lecteur au courant d’événements déjà anciens et de grands malheurs dont le récit suffirait à occuper deux ou trois des chapitres suivants. » [1]

Lorsqu’il s’agit, au contraire, de comparer la conduite de Catherine Morland à celle d’une Emilie ou d’une Adeline, nous trouvons mieux que de « brèves indications ». Catherine, oubliée par son danseur, reste assise dans un coin de la salle de bal, songeant avec quelque regret à l’aimable Mr. Tilney, qu’elle croit absent. « Elle avait grande envie de danser et savait bien que, puisque personne n’était au courant de sa situation, elle partageait avec les autres jeunes filles qui faisaient tapisserie, l’opprobre de n’avoir pas été invitée à danser. Être déshonorée aux yeux du monde, être revêtue d’une apparence d’infamie alors qu’on a le cœur empli de pureté…, voilà ce que connaît la vie d’une héroïne… Catherine souffrit alors, mais pas un murmure ne s’échappa de ses lèvres… Au bout de dix minutes, elle revint à des pensées plus agréables en apercevant Mr. Tilney… Il avait, comme toujours, l’air souriant et animé et parlait avec vivacité à une jeune personne très bien parée et d’aspect agréable qui s’appuyait à son bras. Catherine devina que cette jeune personne était la sœur de Mr. Tilney, négligeant ainsi, par une fâcheuse étourderie, une belle occasion de croire que le jeune homme était à jamais séparé d’elle et était déjà marié… C’est pourquoi, au lieu de laisser une

  1. L’abbaye de Northanger. Chap. IV.