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de Robinson Crusoé.

à tenir un journal que je continuai autant que dura mon encre.

Or ce début vous paroît sans doute assez fastidieux ; & je ne doute pas que vous ne préfériez celui-ci ; mais l’exactitude m’obligera à vous répéter plusieurs particularités dont je vous ai déjà parlé.




JOURNAL.

Le 30 Septembre de l’an 1659. Après avoir fait naufrage durant une horrible tempête, qui depuis plusieurs jours emportoit le bâtiment hors de sa route, moi malheureux Robinson Crusoé; seul échappé de tout l’équipage, que je vis périr devant mes yeux, étant plus mort que vif, je pris terre dans cette Isle infortuné ; ce qui fût cause que j’ai cru pouvoir à juste titre l’appeler l’Isle de désespoir.

Je passai tout le reste du jour à m’affliger de l’état affreux où j’étois réduit, n’ayant ni alimens, ni retraite, ni habits, ni armes, dénué de toute espérance de recevoir du secours, m’attendant à être la proie des bêtes féroces, la victime des Sauvages, ou le martyre de la faim, ne voyant en un mot devant moi que l’image de la mort. À l’approche de la nuit, je montai sur un arbre de peur des animaux sauvages, de quelque