Page:Anonyme ou Collectif - Voyages imaginaires, songes, visions et romans cabalistiques, tome 1.djvu/20

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du Traducteur.

je trouve dans cette histoire, n’en doit point dégoûter le lecteur ; la naïveté en fait le caractère essentiel ; & dans une pareille relation, elle vaut infiniment mieux que la finesse d’esprit.

Il y a pourtant des personnes qui y découvrent une grande finesse bien dangereuse. Ils s’imaginent que ce livre a été fait pour sapper la base de la religion ; mais il n’est pas possible de donner dans un rafinement plus bizarre. Il ne se peut rien trouver de plus orthodoxe que le pauvre Robinson Crusoé ; rien n’est plus édifiant que les réflexions continuelles qu’il fait, pour justifier la providence divine dans toute sa conduite avec les hommes ; rien de plus exemplaire que sa résignation dans tous les malheurs sous lesquels il est obligé de gémir.

Si son but avoit été de répandre un venin caché dans ses ouvrages, il en avoit une occasion très-naturelle, quand s’étant assujetti un sauvage du continent, il s’efforçoit à jeter dans l’ame de ce barbare les premiers fondemens de la religion chrétienne. Il étoit le maître de prêter à ce sauvage toutes les difficultés qu’il pouvoit croire embarrassantes. Mais bien loin de-là, il lui donne une raison très-souple, & lui fait recevoir les principes