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de Robinson Crusoé.

secours & je le regardois comme le plus précieux de tous mes biens. Cependant tant de choses à faire & tant d’autres dont j’avois un besoin extrême, m’auroient fait perdre patience si ce n’eût été qu’il n’y avoit point de remède à cela : d’ailleurs la perte de mon tems ne devoit pas tant me tenir au cœur, parce, que de la manière dont je l’avois divisé, il y avoit une certaine partie du jour affectée à ces sortes d’ouvrages, & comme je ne voulois employer aucune portion de mon blé à faire du pain jusqu’à ce que j’en eusse une plus grande provision, j’avois par devers moi les six mois prochain pour tâcher de me fournir par mon travail & par mon industrie de tous les ustensiles propres à tourner à profit les grains que je recueillerois.

Mais auparavant il me falloit préparer un plus grand espace de terre, parce que j’avois déjà une assez bonne quantité de semence pour ensemencer plus d’un arpent. Je ne pouvois préparer la terre sans me faire une bêche. C’est aussi par où je commençai ; & il ne se passa pas moins d’une semaine entière avant que je l’eusse achevée, encore étoit-elle fort rude & mal figurée ; ensorte que mon ouvrage en devint une fois plus pénible. Mais tout cela ne fut point capable de me décourager, ni de m’empêcher de passer outre : & enfin je jetai ma semence en deux pièces de terre plates