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de Robinson Crusoé.

Portugais dans son bord, lorsque je possédois une belle plantation dans le Brésil, lorsque je reçus ma cargaison d’Angleterre, & en plusieurs autres occasions, je ne rendis jamais à Dieu les actions de graces que je lui devois. Dans mes plus grandes calamités je ne songeai jamais à l’invoquer. Je ne parlois de cet être suprême que pour avilir son nom, que pour jurer, que pour blasphêmer.

J’avois vécu en scélérat, dans l’iniquité & le crime, & néanmoins ma conservation étoit l’effet de la providence. Dieu avoit déployé à mon égard des bontés sans nombre : il m’avoit puni au-dessous de ce que mes iniquités méritoient, & avoit pourvu libéralement à ma subsistance. Toutes ces réflexions me donnèrent lieu d’espérer que Dieu avoit accepté ma repentance, & que je n’avois pas encore épuisé les trésors infinis de sa miséricorde.

Elles me portèrent non-seulement à une entière résignation à la volonté de Dieu ; mais encore elles m’inspirèrent à son égard de vifs sentimens de reconnoissance. J’étois encore au nombre des vivans, je n’avois pas reçu la juste punition de mes crimes ; au contraire je jouissois de plusieurs avantages auxquels je n’aurois pas dû m’attendre ; ainsi je n’avois pas à me plaindre ni à murmurer davantage de ma condition ; j’avois tout lieu au contraire de me réjouir, & de remercier Dieu