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de Robinson Crusoé.

j’étois d’une lassitude extraordinaire : je m’endormis d’abord. Lecteurs qui lirez cette histoire, jugez quelle fut ma surprise de me voir réveiller par une voix qui m’appeloit à diverses fois par mon nom : Robinson, Robinson Crusoé, pauvre Robinson Crusoé, où avez-vous été ; Robinson Crusoé, où êtes-vous ; Robinson, Robinson Crusoé, où avez-vous été ?

Comme j’avois ramé tout le matin, & marché tout l’après-midi, j’étois tellement fatigué, que je ne m’éveillai pas entièrement. J’étois assoupi, moitié endormi & moitié éveillé, & croyois songer que quelqu’un me parloit. Mais la voix continuant de répéter Robinson Crusoé, Robinson Crusoé, je m’éveillai enfin tout à fait, mais tout épouvanté & dans la dernière consternation. Je me remis un peu néanmoins, après avoir vu mon perroquet perché sur la haie : je connus d’abord que c’étoit lui qui m’avoit parlé, car je l’avois ainsi instruit. Souvent il venoit se reposer sur mon doigt, & approchant son bec de mon visage, il se mettoit à crier : pauvre Robinson Crusoé, où êtes-vous, où avez-vous été, comment êtes-vous venu ici ? & autres choses semblables.

Mais quoique je fusse certain que personne ne pouvoit m’avoir parlé, que mon perroquet, j’eus pourtant quelque peine à me remettre. « Comment, disois-je, est-il venu dans cet endroit