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Les aventures

plutôt que dans tout autre ? » Comme néanmoins il n’y avoit que lui qui pût m’avoir parlé, je quittai ces réflexions, & l’appelant par son nom, cet aimable oiseau vint se reposer sur mon pouce, & me disoit, comme s’il eût été ravi de me revoir : Pauvre Robinson Crusoé, où avez-vous été ? &c. Je l’emportai ensuite au logis.

J’avois maintenant assez couru sur mer, & j’avois grand besoin de me reposer & de réfléchir sur les dangers par où j’avois passé. J’aurois été ravi d’avoir mon canot dans la baie qui étoit près de ma maison : mais je ne voyois pas que cela fût possible. Je ne voulois plus me hazarder à faire le tour de l’île du côté de l’est. À cette seule pensée mon cœur se resserroit, & mes veines devenoient toutes glacées. Pour l’autre côté de l’île je ne le connoissois point, mais j’avois tout lieu de croire que le courant dont j’ai parlé, y régnoit aussi bien que vers l’est, & qu’ainsi je courrois risque d’y être précipité, & d’être emporté bien loin de mon île. Je me passai donc de canot, & me résolus ainsi à perdre les fruits d’un travail de plusieurs mois.

Dans cet état je vécus plus d’un an, dans une vie retirée, comme on peut bien se l’imaginer. J’étois tranquille par rapport à ma condition : je m’étois résigné aux ordres de la providence, &,