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Les aventures

tems trop chargé pour découvrir le continent, je lui demandois s’il ne se souhaitoit pas dans son pays au milieu de sa nation. Oui, répondit-il, moi fort joyeux voir ma nation. Eh ! qu’y feriez-vous lui dis-je ? voudriez vous redevenir sauvage, & manger encore de la chair humaine ? Il parut chagrin à cette question, & branla la tête : non, répliqua-t-il, Vendredi leur conter vivres bons, prier Dieu, manger pain de blé, chair de bêtes, lait, non plus manger hommes. Mais ils vous mangeront, répartis-je, Non, dit-il, eux non tuer moi, volontiers aimer apprendre ; à quoi il ajouta qu’ils avoient appris beaucoup de choses des hommes barbus qui y étoient venus dans la chaloupe. Je lui demandai alors s’il avoit envie d’y retourner, & lorsqu’il m’eût répondu en souriant qu’il ne pouvoit pas nâger jusques-là, je lui promis de lui faire un canot. Il me dit alors qu’il le vouloit bien, pourvu que je fusse de la partie, & il m’assura que bien loin de me manger, ils feroient grand cas de moi, lorsqu’il leur auroit conté que j’avois sauvé sa vie, & tué ses ennemis. Pour me tranquilliser là-dessus, il me fit un grand détail de toutes les bontés qu’ils avoient eues pour les hommes barbus, que la tempête avoit jetés sur le rivage.

Depuis ce tems-là je pris la résolution de hasarder le passage, dans le dessein de joindre ces étran-