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Les aventures

sur moi, pour observer & pour imiter mes mouvemens. Après avoir vu l’effet de notre première décharge, je jetai mon mousquet pour prendre le fusil de chasse, & mon esclave en fit de même. Il coucha en joue comme moi. Es-tu prêt, lui demandai-je encore ? & dès qu’il m’eut dit que oui ; feu donc, lui dis-je, au nom de Dieu ; & en même temps nous tirâmes encore parmi la troupe effrayée ; &, comme nos armes étoient chargées d’une dragée grosse, comme de petites balles de pistolet, il n’en tomba que deux ; mais il y en avoit tant de blessée, que nous les vîmes courir la plûpart ça-&-là, tout couverts de sang, & qu’un moment après il en tomba encore trois à demi-morts.

Ayant jeté alors à terre les armes déchargées, je saisis mon second mousquet, j’ordonnai à Vendredi de me suivre ; ce qu’il fit avec beaucoup d’intrépidité. Je sortis brusquement avec Vendredi sur mes talons, & dès que je fus découvert, je poussai un grand cri, comme il fit de son côté ; ensuite je me mis à courir de toutes mes forces, autant que me le permettoit le poids des armes que je portois, vers la pauvre victime qui étoit étendue sur le sable, entre le lieu du festin & la mer. Les bouchers, qui alloient exercer leur art sur ce pauvre malheureux, l’avoient