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de Robinson Crusoé.

comme il venoit du nord-ouest, & qu’il leur étoit contraire, il ne me parut guères possible alors qu’ils pussent gagner leurs côtes.

Pour revenir à Vendredi, il étoit tellement occupé autour de son père, que pendant assez long-tems je n’eus pas le cœur de le retirer de-là ; mais quand je crus qu’il avoit suffisamment satisfait ses transports, je l’appelai : il vint en sautant, en riant & en marquant la joie la plus vive. Je lui demandai s’il avoit donné du pain à son père. Non, dit-il, moi vilain chien, manger tout moi-même. Là-dessus je lui donna un de mes gâteaux d’orge que j’avois dans ma poche, & j’y ajoutai un coup de rum pour lui-même. Il n’y goûta pas seulement, mais alla porter le tout à son père, avec une poignée de raisins secs, que je lui avois donnés encore pour ce bon-homme.

Un moment après je le vis sortir de la barque, & se mettre à courir vers mon habitation avec une telle rapidité, que je le perdis de vue dans un instant ; car c’étoit le garçon le plus agile & le plus léger que j’aie vu de mes jours. J’avois beau crier, il n’entendoit rien ; mais environ un quart-d’heure après je le vis revenir avec moins de vîtesse, parce qu’il portoit quelque chose.

C’étoit un pot rempli d’eau fraîche & quelques morceaux de pain qu’il me donna : pour l’eau il la porta à son père après que j’en eus bu un petit