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de Robinson Crusoé.

épargner. A peine nous en resta-t-il pour vivre pendant les six mois qui devoient s’écouler avant la dernière récolte ; car le grain est six mois en terre dans ce pays-là.

Etant alors assez forts pour ne rien craindre des sauvages, à moins qu’ils ne vinssent en très-grand nombre, nous nous promenions par toute l’île, sans aucune inquiétude ; & comme nous avions tous l’esprit plein de notre délivrance, il m’étoit impossible de ne pas songer aux moyens. Entr’autres choses, je marquai plusieurs arbres qui me paroissoient propres pour mes vues : j’employai Vendredi & son père à les couper, & je leur donnai l’Espagnol pour inspecteur. Je leur montrai avec quel travail infatigable j’avois fait des planches d’un arbre fort épais, & je leur ordonnai d’agir de même. Ils me firent une douzaine de bonnes planches de chêne d’à-peu-près deux pieds de large, de trente-cinq de long, & épaisses depuis deux pouces jusqu’à quatre. On peut comprendre quelle peine il falloit pour en venir à bout.

Je songeois en même tems à augmenter mon troupeau ; tantôt j’allois à la chasse moi même avec Vendredi, tantôt je l’envoyois avec l’Espagnol, & de cette manière nous attrapâmes vingt-deux chevreaux, que nous joignîmes à notre troupeau apprivoisé ; car quand il nous arrivoit