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Les aventures

La marée étoit justement au plus haut quand ces gens étoient venus à terre ; & en partie en parlant avec leurs prisonniers, en partie en rôdant par tous les coins de l’île, ils s’étoient amusés jusqu’à ce que la mer s’étant retirée par le reflux, eût laissé leur chaloupe à sec.

Ils y avoient laissé deux hommes qui, à force de boire de l’eau-de-vie, s’étoient endormis : cependant l’un s’éveillant plutôt que l’autre & trouvant la chaloupe trop enfoncée dans le sable, pour l’en tirer tout seul, il fit approcher les autres par ses cris ; mais ils n’eurent pas assez de force tous ensemble pour la tirer de-là, parce qu’elle étoit extrêmement pesante, & que le rivage de ce côté-là étoit mou comme un sable mouvant.

Voyant cette difficulté, comme véritables gens de mer, les plus négligens de tous les hommes peut-être, ils résolurent de n’y plus songer, & ils se mirent à parcourir l’île. J’en entendis un qui appelant un de ses camarades pour le faire venir à terre ; Hé ! Jean, lui cria-t-il, laisse-la en repos si tu peux ; la marée prochaine la remettra bien à flot. Ce discours me confirma encore dans l’opinion qu’ils étoient mes compatriotes.

Pendant tout ce tems-là je me tins dans l’enceinte de mon château, sans aller plus loin que mon observatoire, & j’étois bien aise d’avoir eu la prudence de fortifier si bien mon habitation ;

je