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Les aventures

nant à moi ; il est vrai qu’ils avoient du tems pour se reposer, puisque le plus sûr pour nous étoit d’attaquer les ennemis pendant l’obscurité.

Ceux-là ne revinrent à leur chaloupe que quelques heures après le retour de Vendredi, & nous pouvions entendre distinctement les plus avancés crier aux autres de se presser ; à quoi les autres répondoient, qu’ils étoient à moitié morts de lassitude : nouvelle fort agréable pour nous.

Il n’est pas possible d’exprimer quel fut leur étonnement, quand ils virent la marée écoulée, la chaloupe engagée dans le sable, & sans gardes. Nous les entendions crier les uns aux autres de la manière la plus lamentable, qu’ils étoient dans une île enchantée : & que si elle étoit habitée par des hommes, ils seroient tous massacrés ; & si c’étoit par des esprits, qu’ils seroient enlevés & dévorés.

Ils se mirent à crier de nouveau, & à appeler leurs deux camarades par leurs noms ; mais point de réponse. Nous les vîmes alors, par le peu de jour qui restoit encore, courir ça & là, & se tordre les mains, comme des gens désespérés. Tantôt ils entroient dans la chaloupe pour s’y reposer, tantôt ils en sortoient pour courir sur le rivage ; & ils continuèrent ce manége sans relâche pendant assez de tems.

Mes gens avoient grande envie de donner des-