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de Robinson Crusoé.

le Brésil pour tout le reste de ma vie : j’ajoutai à ces promesses un joli présent de quelques pièces d’étoffes de soie d’Italie, de deux pièces de draps d’Angleterre, de cinq pièces de baie noire, & de quelques pièces de ruban de Flandre d’un assez grand prix.

Ayant mis ainsi ordre à mes affaires, vendu ma cargaison, & réduit toutes mes marchandises en argent, je ne trouvai plus rien d’embarrassant que le choix de la route que je devois prendre pour passer en Angleterre. J’étois fort accoutumé à la mer, & cependant je me sentoit une aversion extraordinaire pour m’y hasarder, & quoique je fusse incapable d’en alléguer la moindre raison, cette aversion redoubloit de jour en jour d’une telle force, que je fis remettre à terre jusqu’à deux ou trois fois mon bagage, que j’avois déjà fait embarquer.

J’avoue que j’avois essuyé assez de malheurs sur cet élément pour le craindre ; mais cette raison faisoit des impressions moins fortes sur mon esprit, que ces mouvemens secrets dont je me sentois saisi, & que j’avois grande raison de ne pas négliger, comme il parut par l’évènement. Deux de ces vaisseaux, dans lesquels, à différens tems, j’avois voulu m’embarquer, furent très-malheureux dans leur voyage : l’un fut pris par les Algériens, & l’autre fit naufrage près de Torbay,