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de Robinson Crusoé.

coup à côté de nous, où il voyoit un grand chêne très-propre à l’exécution de son projet, & nous faisant signe de le suivre, il met bas son fusil à quelque pas de l’arbre, & il y grimpe avec une adresse étonnante. Nous suivions, cependant, à quelque distance, l’ours irrité qui prenoit le même chemin, étant proche de l’arbre, il s’arrête auprès du fusil, le flaire, & le laissant là, il se met à grimper contre le tronc de l’arbre, à la manière des chats, quoi qu’il fût d’une pesanteur extraordinaire.

J’étois surpris de la folie de mon valet, & jusques-là je ne voyois pas le mot pour rire dans toute cette affaire. L’ours avoit déjà gagné les branches de l’arbre, & il avoit fait la moitié du chemin depuis le tronc jusqu’à l’endroit où Vendredi s’étoit mis sur l’extrémité foible d’une grosse branche. Dès que l’animal eut mis les pattes sur la même branche, & qu’il se fut mis en devoir d’aller jusqu’à mon valet, il nous cria qu’il alloit apprendre à danser à l’ours ; & en même tems il se met à sauter sur la branche, & à la remuer de toutes ses forces ; ce qui fit chanceler l’ours, que regardoit déjà en arrière, pour voir de quelle manière il se tireroit de là ; ce qui nous fit rire effectivement de tout notre cœur. Mais la farce n’étoit pas encore jouée jusqu’au bout ; quand Vendredi vit l’animal s’arrêter, il lui parla de