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Les aventures

puisque plusieurs autres ont infiniment mieux parlé de tout ce qui concerne ce pays, que je ne saurois le faire. Je dirai seulement que, sans m’arrêter beaucoup, je passai de Toulon à Calais par Paris, & que j’arrivai à Douvres le 11 de Janvier, après avoir essuyé un froid presque insupportable.

J’étois parvenu alors au centre de mes desirs, ayant avec moi tout mon bien, & voyant toutes mes lettres de change payées sans aucun délai.

Dans cette heureuse situation, je me servois de ma bonne veuve comme de mon conseiller privé ; ses bontés pour moi étoient animées & redoublées par la reconnoissance, & elle ne trouvoit aucun soin trop embarrassant, ni aucune peine trop fatiguante, quand il s’agissoit de me rendre service. Aussi avois-je si parfaite confiance en elle, que je croyois tous mes effets en sûreté entre ses mains ; & certainement pendant tout le tems que j’ai joui de son amitié, je me suis cru heureux d’avoir trouvé une personne d’une probité si inaltérable.

J’étois déjà résolu à lui laisser la direction de toutes mes affaires, & à partir pour Lisbonne, pour fixer ma demeure dans le Brésil, quand une délicatesse de conscience m’en vint détourner. J’avois réfléchi souvent, & sur-tout pendant ma vie solitaire, sur le peu de sûreté qu’il