Page:Apoukhtine - La Vie ambiguë.djvu/187

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lumières apparaissent-elles parfois, comme il m’est arrivé quand je suis entré au château de La Roche-Maudin ?

De toute ma volonté, je me cramponnais à ce souvenir comme le noyé à une épave ; il me semblait que si je me rappelais clairement et exactement ma vie dans ce château je comprendrais tout le reste. Maintenant qu’aucune sensation du dehors ne me distrayait, je m’abandonnais aux houles du souvenir, inerte et sans pensée pour ne pas gêner leur mouvement, et tout à coup, du fond de mon âme comme des brumes d’un fleuve, commençaient à s’élever de fugaces figures humaines ; des mots au sens effacé résonnaient, et dans tous ces souvenirs étaient des lacunes… Les visages étaient vaporeux, les paroles étaient sans lien, tout était décousu. Voilà bien le cimetière de la famille des comtes de La Roche-Maudin ; sur une plaque de marbre blanc je lis clairement en caractères noirs : « Ci-gît très haute et vénérable dame… » ; plus loin, s’inscrit le nom, mais je ne puis le déchiffrer. À côté, il y a un sarcophage avec une urne de marbre sur laquelle je lis : « Ci-gît le cœur du marquis… »

Tout à coup à mes oreilles une voix impatiente glapit : « Zo… zo ». Un effort de mé-