Page:Apoukhtine - La Vie ambiguë.djvu/233

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

moins impressionné que ces paroles amicales. Quelque chose m’oppressait le cœur ; le vague pressentiment d’un malheur me tint éveillé : ce ne fut qu’au matin que je m’endormis d’un sommeil lourd, troublé.

Je fus éveillé par la nouvelle de la mort d’Aliocha. Le docteur perdit absolument la tête devant cette fin imprévue ; mais il finit par décider qu’elle était due à une rechute et se tranquillisa. On attribua la cause de la rechute à la porte ouverte du balcon. Toute la ville assista au service ; chacun fut frappé de la profonde douleur d’Hélène Pavlovna. Il ne me venait pas en tête de douter de sa sincérité, car moi-même je souffrais cruellement de douleur et de honte ; à l’enterrement, elle se frappa la tête contre le cercueil et tomba évanouie sur les marches du catafalque.

Je ne savais pas s’il était convenable de lui faire visite le jour même ; mais elle me tira d’embarras en m’écrivant qu’elle m’attendrait à neuf heures. Je la trouvai pâle, mais calme, vêtue d’une robe neuve, blanche, garnie de dentelles. Elle m’aborda par ces paroles : « Quel bonheur que tout cela soit enfin fini ! » Et avec un sourire elle me tendit la main.

Je fus si étonné de ces paroles, de ce sou-