Page:Apoukhtine - La Vie ambiguë.djvu/305

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

remercier ! J’étais condamné à mourir, et sans un miracle, je serais dans la tombe, je ne jouirais pas de ce bienfaisant soleil, de cette ombre délicieuse, le coq chanterait devant ma tombe, mais je n’entendrais pas son cri ! Je sais que l’heure n’est pas loin, mais je dois te savoir gré de ce délai et en profiter. Quoi qu’il puisse m’arriver maintenant, je ne crains plus rien ; si j’étais condamné aux travaux les plus pénibles ; s’il me fallait mener l’existence d’un mendiant sans asile, alors même je ne me révolterais pas. Dormir sur la terre nue vaut encore mieux que dormir dessous. D’ennemis je n’en puis avoir ; il n’y a pas d’outrage que je ne puisse pardonner. Je crois n’avoir haï personne aussi vivement que Michel Kozielsky, et maintenant je pense à lui sans amertume ; dans trois semaines, j’irai à la campagne chez Maria Pétrovna et je passerai chez elle la fin de l’été. Puis, à la fin d’août, aura lieu le mariage de Lydia, et j’ai promis d’être garçon d’honneur.

Je ne puis me rappeler cette charmante enfant sans attendrissement, bien que le démon de l’amour soit complètement endormi en moi et, je l’espère, ne doive plus s’éveiller. Ces jours-ci, Lydia m’a écrit :