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Demi-chœur.

Il convient à un chœur religieux d’instruire une ville et de lui dire ce qui la regarde. Il nous semble que le premier soin doit être d’établir l’égalité parfaite entre les citoyens et de bannir toute crainte[1]. Quelqu’un, séduit par l’éloquence de Phrynichus[2], a-t-il fait quelque faute, je prétends qu’il faut donner à tous ceux qui en ont pu commettre de ce genre la permission de se justifier et de se laver des crimes qu’on leur a d’abord imputés. J’ajoute que qui que ce soit d’entre nous ne doit être exclus des honneurs. Il est cependant honteux que, pour s’être trouvé une fois à un combat naval, on jouisse aussitôt des mêmes droits que les Platéens, et que des esclaves soient transformés en maîtres. Ce n’est pas que je veuille dire que cela soit mal fait, j’y applaudis au contraire, et c’est la seule chose sensée que vous ayez faite. Il convient en outre qu’on oublie l’unique reproche qu’on puisse faire à ceux qui ont déjà livré souvent avec vous des batailles sur mer[3] : ce sont vos pères et vos parents, et ils réclament cette faveur de votre part. Ainsi, ô les plus sages

  1. Aristophane persifle les Athéniens sur la liberté qu’ils avaient accordée aux esclaves, et sur leur admission au droit de citoyens après le combat des Arginuses. Il propose, puisqu’on ne veut plus de distinction dans les rangs, de ne plus faire une classe particulière des gens déclarés infâmes ; l’homme noté d’infamie, à Athènes, était plus ou moins exclu des droits et privilèges des citoyens, suivant qu’il était noté d’infamie pour des raisons plus ou moins graves, Aristophane dit donc ici qu’il ne faut plus distinguer cette classe des autres, et qu’il faut les délivrer de la crainte où les retient le crime qui les a fait noter d’infamie. (b.)
  2. Il s’agit ici du général de ce nom, dont Thucydide fait mention I, viii. Il fut très favorable à l’oligarchie, et fut tué en plein marché.
  3. Aristophane veut qu’on excuse aussi ceux qui ne se sont pas trouvés aux Arginuses, et qu’on les admette aux mêmes prérogatives que les braves qui y combattirent.