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que pour lui la noblesse et la spiritualité de l’âme, éteignait les charbons ardents que l’imposture du démon cherchait à allumer dans son cœur. L’ennemi lui offrait-il de nouveau les douceurs de la volupté, Antoine, d’un air irrité et plein d’affliction, pensait aux menaces des flammes éternelles et au supplice des vers ; en opposant ces moyens, il échappait à tous les périls sans être atteint. Tant de victoires couvraient l’ennemi de confusion ; celui qui se croyait semblable à Dieu était le jouet d’un jeune homme ; celui qui se vantait d’avoir tout pouvoir sur la chair et le sang était mis en fuite par un homme revêtu de chair, car le Seigneur qui s’est fait chair à cause de nous venait à son secours et donnait au corps la victoire contre le démon ; c’est pourquoi quiconque combat avec courage doit dire : « Ce n’est pas moi, mais la grâce de Dieu qui est en moi. (I. Corinth., xv. 10.) » Le démon ne pouvant vaincre Antoine de cette manière et voyant qu’il était chassé de son cœur, grinçant des dents et hors de lui-même, lui apparut sous la forme d’un petit nègre tel qu’il est en esprit. Ce n’est pas par des raisonnements qu’il l’attaque, mais, employant la ruse, il se jette à ses pieds, prend une voix humaine et lui adresse ces paroles : « J’ai trompé beaucoup de monde et j’en ai renversé un grand nombre ; de même que j’ai attaqué les autres, de même je t’ai attaqué ainsi que tes travaux, de même je suis vaincu. » Antoine lui ayant demandé : « Qui es-tu ? » « Je suis l’ami de l’incontinence, c’est moi qui dresse les embûches et qui excite les désirs pour y entraîner la jeunesse, et l’on me nomme l’esprit de fornication. Combien n’en ai-je pas trompé qui voulaient être vertueux ; à combien qui vivaient dans la continence n’ai-je pas fait changer de résolution par l’amorce du plaisir. Je suis celui à cause duquel le prophète blâme ceux qui sont tombés lorsqu’il dit : « Vous avez été trompés par l’esprit de fornication (Osée, iv, 12), » et c’est par moi en effet qu’ils ont