Page:Audebrand - Derniers jours de la Bohème, Calmann-Lévy.djvu/98

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— C’est bien mon avis.

— En faisant des fouilles à Tanagra, dans le pays d’Epaminondas, on vient de découvrir des statuettes minuscules, des figures de deux pouces de long, irréprochables au point de vue de l’art. Chez nous, tous les jours, Meissonier improvise des chefs-d’œuvre qui tiennent dans le creux de la main. Voyons, est-ce qu’une romance réussie, celle des Hirondelles de Félicien David, entre autres, ne serait pas à classer dans l’ordre de ces merveilles ?

— Évidemment, oui. Honneur à ce petit opéra sentimental qui s’appelle la romance.

— Permettez, je n’ai pas tout dit. Savez-vous, monsieur, combien il faut d’efforts réunis pour mettre une romance sur pied ? Tout un concours. Sept hommes d’élite, pas un de moins. Comptons, s’il vous plaît : 1° il en faut un pour la première conception, pour les paroles ; 2° un musicien pour lui infuser une âme ; 3° un exécuteur, pianiste, flûtiste, guitariste, violoniste, harpiste, instrumentiste qui entre dans la pensée des deux auteurs ; 4° un éditeur pour divulguer l’œuvre et la faire vivre ; 5° un dessinateur, doublé d’un graveur, pour la traduire graphiquement ; 6° une jolie bouche, surmontant un heureux larynx, qui la mette en valeur ; 7° un coquin de journaliste pour la faire connaître aux quatre points cardinaux. Total : toute une escouade de travailleurs. Cet illustre Annibal dont parlent