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MARIE-CLAIRE

sans bouger, à regarder travailler les autres.

Marie Renaud cousait en silence ; elle faisait des points si petits et si serrés, qu’il fallait avoir de bons yeux pour les voir.

Ismérie cousait en chantonnant sans crainte des réprimandes.

Les unes cousaient le dos courbé, le front plissé, avec des doigts mouillés qui faisaient crisser les aiguilles ; d’autres cousaient lentement, avec soin, sans fatigue, sans ennui, en comptant les points tout bas.

J’aurais bien voulu être comme celles-là ! Je me grondais en moi-même, et pendant quelques minutes je les imitais.

Mais le moindre bruit me dérangeait, et je restais à écouter ou regarder ce qui se passait autour de moi. Madeleine disait que j’avais toujours le nez en l’air.

Je passais tout mon temps à imaginer des aiguilles qui auraient cousu toutes seules.

Pendant longtemps, j’ai eu l’espoir qu’une gentille petite vieille, visible pour moi seulement, sortirait de la grande cheminée et viendrait coudre ma coiffe très vite.

Je finis par devenir insensible aux repro-