Page:Audubon - Scènes de la nature, traduction Bazin, 1868, tome 1.djvu/343

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et sans aucune odeur ! Cela me donnait à réfléchir, et j’en conclus qu’à tout événement les facultés visuelles étaient chez lui bien supérieures à celles de l’odorat.

Deuxième expérience. — Je fis traîner, à quelque distance de ma maison, un porc qui venait de périr, et que l’on jeta dans un ravin profond d’une vingtaine de pieds, où le vent soufflait très fort, et qui était obscur, rempli de broussailles et de grands roseaux. C’est là que j’ordonnai à mes gens de cacher l’animal, en recourbant les roseaux par-dessus, et je l’y laissai deux jours, pensant bien que cela intriguerait busards, vautours noirs ou autres, et qu’ils viendraient voir ce que ce pouvait être.

On était alors au commencement de juillet, c’est-à-dire à une époque où, sous ces latitudes, un cadavre se corrompt et devient extrêmement fétide en très peu de temps. D’un moment à l’autre, je voyais des vautours cherchant la proie, passer par-dessus le champ et le ravin dans toutes les directions ; mais aucun ne découvrit celle qui y était cachée, bien que, sur ces entrefaites, plusieurs chiens lui eussent rendu visite, et s’en fussent copieusement repus. Je voulus moi-même m’en approcher, mais l’odeur en était si insupportable à vingt pas à la ronde, que j’y renonçai ; et les restes, tombant d’eux-mêmes en putréfaction, finirent par être entièrement détruits.

Alors je pris un jeune porc, et d’un coup de couteau dans la gorge le saignai sur la terre et l’herbe, à peu près à la même place ; puis, l’ayant soigneusement recouvert de feuilles, j’attendis le résultat. Les vautours