Page:Audubon - Scènes de la nature, traduction Bazin, 1868, tome 1.djvu/59

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de sorte que les pauvres prisonniers périssent de faim ; car, quelque étrange que cela paraisse, rarement recouvrent-ils leur liberté en s’avisant de descendre dans la tranchée et de retourner sur leurs pas. Plus d’une fois j’en ai trouvé quatre, cinq et même dix de morts dans une cage par pure négligence. Là où les loups et les lynx sont nombreux, ils savent très bien rendre visite à la cage et la débarrasser de son butin, avant le propriétaire. Un matin j’eus la satisfaction de prendre dans une des miennes un beau loup qui, lorsqu’il m’avait vu, s’était tapi, croyant que je passerais dans une autre direction.

Les dindons sauvages s’approchent souvent des dindons domestiques, s’associent ou bien se battent avec eux, les chassent et s’approprient leur nourriture ; quelquefois les coqs font la cour aux femelles apprivoisées, et en sont généralement reçus avec grande faveur, aussi bien que par les propriétaires de ces dernières, qui connaissent parfaitement l’avantage de ces sortes d’unions. En effet, la race métisse qui en provient, est beaucoup plus vigoureuse que celle des domestiqués, et par suite, bien plus facile à élever.

À Henderson, sur l’Ohio, j’avais chez moi, parmi beaucoup d’autres oiseaux sauvages, un superbe dindon élevé par mes soins dès sa première jeunesse, puisque je l’avais pris n’ayant probablement pas plus de deux ou trois jours. Il s’était rendu si familier, qu’il suivait tout le monde à la voix, et était devenu le favori du petit village ; toutefois, il ne voulut jamais se percher avec les dindons domestiques, mais régulièrement se retirait à la nuit,