Page:Audubon - Scènes de la nature, traduction Bazin, 1868, tome 1.djvu/74

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grande partie de mon temps à dessiner. Un matin, comme je me tenais près de la fenêtre de ma chambre je vis descendre de cheval un homme grand et d’apparence robuste, qui défit la sangle, enleva la selle d’une main, passa de l’autre, la bride par-dessus la tête de l’animal, et se dirigea vers la maison, tandis que le cheval s’en allait de lui-même boire au petit ruisseau. Il se fit alors un certain mouvement dans l’appartement au-dessous de moi, puis je vis ressortir le grand individu qui prit le chemin des scieries et des magasins situés à environ cent mètres de la maison. Les affaires avant tout ! Telle est la devise des Américains ; et, en cela, ils n’ont pas tort. Au bout de quelques minutes mon hôtesse entra dans ma chambre, accompagnée d’un homme à la mine prévenante, que je reconnus de suite pour un habitant des bois, et qu’elle me présenta comme M. Jediah Irish, son mari. Lecteur, je ne puis vous énumérer toutes les qualités de cet homme réellement excellent ; il faut avoir comme moi, vécu dans l’intimité avec lui, pour bien apprécier la valeur d’une telle rencontre, au milieu de nos forêts. Non-seulement il me fit le meilleur accueil, mais promit de me seconder de tous ses efforts, pour la réussite de mes projets.

Nos longues promenades, et ces conversations que nous aimions davantage encore à prolonger, je ne les oublierai jamais, non plus que tant de beaux oiseaux que nous avons poursuivis, tués ensemble, et que nous admirions si bien tous deux ! Cette venaison succulente, cette délicate chair d’ours, ces truites délicieuses, mon régal de chaque jour, il me semble les savourer encore ;