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REIMS


… Elle est là, immobile, muette ; je ne la vois pas : nuit noire.

Mes yeux s’habituent, je distingue un peu, et c’est le grand squelette de toute la France du Moyen Âge qui m’apparaît.

Et c’est une conscience. Nous ne pouvons pas lui échapper. C’est la voix du passé.

Les artistes qui ont fait cela ont jeté dans le monde un reflet de la divinité ; ils ont ajouté leur âme à nos âmes, pour nous grandir, et leur âme est à nous, elle est notre âme en tout ce qu’elle a de meilleur.

Et voici qu’on nous amoindrit en laissant périr l’œuvre de ces maîtres anciens. — L’artiste, témoin de ce crime, se sent lui-même effleuré d’un remords.

Mais ce qui subsiste encore intact garde toute la vie de l’œuvre entière, et nous garde notre âme. C’est dans ces débris que nous avons notre dernier asile. — Ainsi le Parthénon a défendu la Grèce mieux que les plus savants politiques n’ont su faire. Il reste encore l’âme vivante d’un peuple évanoui, et le moindre de ses morceaux est tout le Parthénon.


Vue de trois-quarts, la Cathédrale de Reims évoque une grande figure de femme agenouillée, en prière. C’est le sens que donne la forme de la console.