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D’APRÈS NATURE


L’étude de la nature et l’étude des grandes œuvres accomplies par le génie de l’homme amènent l’esprit aux mêmes conclusions. Quelques mots sur le Modèle vivant ne seront donc pas déplacés, ici : ils préparent à la compréhension de la sculpture comme le moulage prépare à la compréhension de l’architecture.


(Figure couchée.)

Cette belle personne sent, je le vois, le mouvement, le gonflement de pensées qu’elle provoque, cependant qu’à son aspect la statue s’ébauche dans l’esprit de l’artiste.

Il n’a pas pris de selle, il ne s’est pas installé ; mais n’avait-il pas appelé le modèle dans l’intention de travailler d’après lui ?…

Ce bras l’a surpris, cette poitrine… Du reste, il avait déjà deviné la beauté. L’œil parcourt l’ensemble, les détails, puis revient au mouvement de très beau style remarqué tout d’abord, qu’il reconnaît dans sa grande expression et que décidément il étudie.

C’est alors qu’il voit tout ce qu’on peut voir de sculpture. Car la robe est une housse, sans plus. L’artiste désire voir plus. Et que peut-il voir ? Toujours la même splendeur : toujours la vie qui recommence et se renouvelle à chaque pulsation.


Quel éblouissement : une femme qui se déshabille ! C’est l’effet du soleil perçant les nuages.


À la première vue de ce corps, la vue d’ensemble, coup, commotion.


Comme une flèche l’œil, un instant en surprise, repart.


Dans tout modèle il y a la nature entière, et l’œil qui sait voir l’y découvre et l’y suit, si loin ! Il y a surtout ce que la plupart ne savent pas